Ateliers de haïku avec les enfants

Le haïku est spécialement intéressant à faire pratiquer aux enfants et aux adolescents. Les ateliers d’écriture de courts poèmes se déroulent avec succès et plaisir… Tout le monde joue le jeu du haïku !

Avec les tous petits

Même avant de savoir écrire (et lire), un enfant de Maternelle peut écouter des haïkus. Ceux du poète Issa sur les petites bêtes (merveilleuse faune du haïku) sont spécialement adaptés. Mais les enfants peuvent découvrir avec intérêt ceux de Bashô et d’autres grands maîtres dont les textes ont été traduits en français.

A tous les âges : commencer par observer

Après la lecture de haïkus (un haïku se lit toujours deux fois) vient la phase d’observation de ce qui entoure l’enfant. C’est là que réside le germe du poème : dans les petits détails de la classe ou ailleurs. Chaque enfant percevra les choses différemment et l’exprimera à sa façon.

Aperçue par la fenêtre, une pie sur le toit d’en face peut donner lieu à des tentatives de poèmes avec des enfants très petits. Certains la verront noire et blanche. Mais la pie est aussi un peu verte et un peu bleue.

Et pourquoi pas mimer ?

On peut aussi mimer ou donner à mimer des haïkus comme celui-ci :

en rentrant chez lui
le sumo vainqueur évite
d’écraser les insectes

Kobayashi Issa
(traduction M. Tsuchiya)

Cela permet de parler des mots, de leurs synonymes et des insectes que nous connaissons selon la saison. Ce sera l’occasion aussi de faire une petite incursion dans la culture japonaise. Et pourquoi pas, de parler du respect des êtres plus petits par les plus gros… Notre petit poème est vraiment très fort !

Interpréter le haïku

Il est intéressant, avant de commencer à écrire, d’en lire et de tenter de partager (seul.e ou en petits groupes) un haïku choisi. Le poème ci-dessous est spécialement intéressant à proposer à l’interprétation. Pourquoi le rire des uns, le silence des autres ?… Selon l’âge et l’expérience, les enfants iront plus ou moins loin dans leurs interprétations.

rire des enfants
silence des oiseaux
avril sous la neige

Lydia Padellec

Commencer à écrire

Dès que l’enfant sait écrire (à partir du CP), il peut commencer à écrire de courtes phrases sur ce qu’il perçoit avec ses sens. Des phrases simples avec un verbe au présent (pas toujours indispensable), sans souci de l’orthographe à ce stade. On évitera cependant les phrases avec peu de contenu comme « je vois un caillou ». On préférera : « un caillou posé sur la barrière » par exemple. Ou « une primevère blanche sur l’herbe verte ». Car les couleurs sont importantes en poésie. Sans oublier l’ouïe et les autres sens un peu délaissés tels que le toucher et l’odorat : « un parfum de soupe », « la douceur du soleil sur mes paupières »…

Sortir pour un ginko

Le ginko ou balade haïku est le meilleur point de départ pour écrire les petites phrases comme celles ci-dessus. Certes, on peut écrire sans sortir de la classe (ou d’un autre lieu fermé) mais on n’aura pas la fraîcheur de l’air et la rencontre avec l’inespéré qui est la matière première de la poésie. Tous les lieux sont propices pour un ginko, même et surtout ceux que l’on croit connaître : le quartier proche, la cour de récréation. Il faudra s’armer de petits cahiers (mieux que les feuilles volantes), d’un stylo et de quoi s’appuyer : un livre de haïkus par exemple !

Faut-il compter les syllabes ?

Faut-il compter les syllabes pour tomber pile sur les 17 (5-7-5) requises dans le haïku classique ? Le comptage (avec souplesse pour les « e » muets) peut être intéressant pour les enfants très jeunes ou en difficulté. Cela ancrera le poème et fera venir les mots, comme par magie.

Avec les enfants plus grands (collégiens, lycéens), le comptage-obsession deviendra obstacle. On conseille des phrases courtes qui donneront dans la mesure du possible une structure court-long-court… Mais les textes aux structures irrégulières sont aussi intéressants.

La saison est-elle indispensable ?

Les saisons sont importantes dans la vie de chaque jour pour chacun.e de nous. Ce n’est pas la même chose d’essuyer une averse en juillet qu’en janvier. Un rouge-gorge sur le rebord de la fenêtre n’aura pas la même attitude au cœur de l’hiver qu’en été… Les petites choses qui se passent au quotidien, même en ville, retentissent différemment selon la saison. Comme il y a des haïkus sans saison, on pourra les découvrir et les pratiquer aussi.

Nommer les choses de façon précise

Un aspect important de l’écriture de haïkus est la précision. Cela est particulièrement intéressant avec les enfants qui apprennent les mots. Il y a bien sûr les noms des oiseaux et des arbres, le vocabulaire de la nature, mais il y a aussi les mots de tous les jours. Une petite fraîcheur n’est pas la même chose qu’un froid glacial ! L’arbre est-il vraiment « secoué » par le vent d’avril ou ne fait-il que « trembler » doucement ? Etc.

Cour du musée –
une coccinelle se pose
au coin de mon œil

Enzo (11 ans), Collège Philéas Lebesgue de Marseille en Beauvaisis

Parler de la nature

Le haïku ne parle pas que de la nature mais celle-ci est importante car elle se glisse partout, même en ville… Quand l’enfant parle de la nature, en choisissant son sujet précis d’observation, il parle de lui-même sans s’en rendre compte. Les sentiments profonds (rarement nommés dans le haïku) peuvent alors apparaître, en même temps qu’un brin d’herbe tout seul.

L’enfant devenu grand pourra apprendre à suggérer des sentiments personnels en parlant de la nature. Tout un art ! Cette suggestion des choses profondes plaît particulièrement aux adolescents, par nature pudiques.

Cour du musée –
une coccinelle se pose
au coin de mon œil

Enzo (11 ans), Collège Philéas Lebesgue de Marseille en Beauvaisis

Mettre en place un atelier

L’idéal est de disposer d’une journée entière pour un groupe d’une douzaine d’enfants. Mais on peut aussi travailler avec une classe entière si l’animateur.trice a de l’expérience. Dans un milieu non scolaire comme une médiathèque par exemple, il est intéressant de mélanger les âges : enfants, adolescents, adultes. (Les enfants vieillissent, les adultes rajeunissent !)

Au minimum, compter une demie-journée par groupe : la découverte du haïku sera suivie d’un mini-ginko (vingt minutes) et d’une première tentative d’écriture, collective, puis personnelle.

Il faudra compter sur un espace de travail avec du matériel pour écrire (feuilles, stylos, de quoi s’appuyer) et d’un espace pour pouvoir sortir…

Dans d'autres langues aussi

Les haïkus sont intéressants à traduire et à partager avec des écoliers d’autres pays. Leur petit format leur permet de voyager. On peut aussi les écrire directement dans la langue que l’élève est en train d’apprendre. Un titre de livre, une expression simple entendue ou lue peuvent se glisser dans un haïku en anglais, espagnol, allemand…

Et les autres matières scolaires ?

Le haïku se prête bien au travail avec les autres matières de l’école. On peut travailler avec les enseignants d’arts plastiques pour la réalisation d’affiches ou un petit livre d’artiste genre Leporello. Les sciences physiques et les SVT (sciences de la vie de de la Terre) peuvent être sollicitées pour un projet transversal, un herbier-haïku, etc. Et, si l’école en a un, le tas de compost ou le petit potager expérimental est une belle source pour observer les recyclages et écrire des petits vers !

Les tarifs

Le plus souvent, les animateurs pratiquent celui de la Charte des auteurs jeunesse (plus frais de déplacement) en vigueur sur internet. Quand elles adhèrent à la MEL (Maison des Écrivains et de la Littérature), les écoles peuvent faire appel à eux via le programme L’ami littéraire.

Mise en valeur des créations

Plusieurs activités sont possibles pour mettre en valeur les haïkus écrits en classe ou ailleurs :

  • une exposition avec les textes calligraphiés sur des grandes feuilles.
  • un arbre à haïkus (recopiés sur de petits bouts de papier de soie).
  • des haïkus-post-it collés un peu partout, sur les vitres, casiers…
  • une petite brochure ou un livre unique avec des collages, etc
  • une lecture de haïkus pour toute l’école.
  • un concours de haïkus, etc.

Dans sa rubrique Trois pieds de haut, la revue trimestrielle GONG de notre association permet de découvrir une grande variété d’ateliers et de réalisations auprès des enfants.

Un exemple :

à Nogent-sur-Oise, printemps 2019 suite au projet de haïkus illustrés avec Erlina Doho et isabel Asúnsolo et 2 classes de 3ème.

Eric leur a offert, au nom de l’AFH, un exemplaire de Zestes à chacun (livres sans photos).
Vous pouvez les voir avec leur prof de maths, Alexandre Boisson qui était à l’origine du projet, autour du jeu de go.